Une situation exceptionnelle qui demande des mesures exceptionnelles

Jamais le gouvernement n’a autant compté sur les organismes communautaires pour garantir un filet social au Québec qu’en ce temps de crise. Toutefois, les organismes sont très impactés par la crise de la COVID-19 et ce, à plusieurs niveaux, notamment par :  la réorganisation et adaptation des services et activités, l’augmentation des demandes, la diminution des revenus, la diminution ou l’arrêt des services ou activités, la pression accrue sur les travailleurs et travailleuses, la réduction de la main d’oeuvre, les mises à pied, etc.

 

Les impacts à court terme

Dès le début de la crise, le RQ-ACA ainsi que plusieurs regroupements nationaux, régionaux et locaux revendiquent la mise en place de mesures financières d’urgence pour soutenir, à court terme, les organismes communautaire. Parallèlement, de nombreux organismes ont pris l’initiative de faire des demandes de soutien financier d’urgence directement auprès de différents bailleurs de fonds gouvernementaux, mais aussi à l’échelle locale et régionale (député·e·s, municipalités, fondations, etc.). Ainsi, les regroupements locaux, régionaux et nationaux ont rapidement été interpellés pour dresser un portrait de l’impact de la crise sur les organismes.

Alors que le gouvernement et plusieurs municipalités et fondations s’affairent à mettre en place de telles mesures, nous constatons que celles-ci ciblent prioritairement les organismes offrant des services répondant aux besoins de base des personnes les plus touchées par la crise (hébergement, itinérance, aide alimentaire, violence conjugale). Si, à court terme, les mesures mises en place sont urgentes et nécessaires pour pallier aux besoins immédiats des personnes, il ne faut pas oublier que d’autres organismes vivent actuellement une pression importante. Par exemple, plusieurs ont vu leurs activités exploser dans un contexte de diminution importante de la main d’œuvre tels que les organismes venant en aide aux chômeurs et chômeuses, aux locataires, aux personnes assistées sociales, ou encore les organismes en prévention du suicide, en santé mentale, etc. C’est pourquoi, comme mouvement communautaire, il est essentiel de poursuivre nos revendications auprès du gouvernement afin que tous les organismes impactés par la crise – qu’ils maintiennent ou non leurs activités – puissent bénéficier d’un soutien urgent.

 

Les impacts à long terme

Au-delà des besoins urgents, nous pensons que les impacts de la crise sur les organismes communautaires seront importants et variés et qu’ils se feront sentir sur une longue période de temps. Une fois la crise terminée, le tissu communautaire aura-t-il subi des transformations importantes? Les ressources humaines seront-elles épuisées? Seront-elles suffisantes? Verrons-nous une redéfinition des activités des organismes? La vie associative en sera-t-elle affectée?

Bien que les données soient manquantes, il est déjà possible d’identifier plusieurs enjeux et difficultés, immédiats et à venir, pour les organismes communautaires :

  • Enjeux sanitaires, par exemple, la disponibilité des équipements ou encore l’enjeu de la santé et de la sécurité au travail, etc.
  • Enjeux d’aide direct aux personnes tels que les difficultés d’approvisionnement des denrées alimentaires, l’offre de petits prêts aux personnes en difficulté ou autres
  • Enjeux liés à la réponse à de nouveaux besoins ou au renouvellement de l’offre de services
  • Enjeux de ressources humaines avec le manque de personnels et de bénévoles dans les organismes offrant des services prioritaires, la difficulté de maintenir le personnel en place, l’enjeu du recrutement, la gestion des bénévoles, le risque d’essoufflement, la détresse psychologique des travailleurs, etc.
  • Enjeux de perte de revenus en raison des projets reportés, des activités d’autofinancement annulées ou encore des ventes compromises de biens et services.
  • Enjeux technologiques pour assurer l’adaptation des services et des activités, l’achat d’équipements et de plateformes informatiques et web permettant le télétravail, etc.

 

Une crise qui créera beaucoup de pauvreté

De plus, une fois la crise passée, nous savons que la relance économique ne profitera pas à tout le monde et qu’il y aura beaucoup de nouvelles personnes en situation de pauvreté, ce qui provoquera une hausse des demandes de soutien dans les organismes. Après avoir absorbé les effets de l’austérité pendant des années, et sans savoir quels seront les effets de la crise à court terme sur les organismes, le communautaire aura-t-il la capacité d’absorber à moyen et à long terme les effets de la crise de la COVID-19? Rien n’est moins sûr dans un contexte de crise économique, doublé par un sous-financement chronique qui perdure depuis plusieurs décennies.  Dans un contexte où le gouvernement nous parle volontiers de crise sanitaire et de crise économique, il est essentiel de développer un discours fort autour de la crise sociale qui suivra. Rappelons-nous que ce sont les personnes en situation de vulnérabilité qui sont les plus touchées par la crise et qu’encore une fois, ce sont les organismes communautaires qui subiront la pression due à la désorganisation et au manque de services dans le réseau public.

 

Un levier politique pour une réelle reconnaissance de l’ACA

Ainsi, nous pensons qu’il est important de documenter les impacts à long terme qu’aura cette crise sur l’action communautaire autonome, de mettre de l’avant les réalisations et la contribution des organismes pendant la crise et d’évaluer ce qui devrait être mis en place pour garantir une pleine capacité d’action des organismes communautaires, tous secteurs confondus, lors de cette situation d’urgence. Plus encore, il est essentiel de positionner le mouvement communautaire comme un maillon essentiel et incontournable du filet social au Québec et de demander le soutien financier auquel une réelle reconnaissance devrait donner droit.

Vous souhaitez contribuer à documenter les impacts de la crise sur votre organisme? D’autres détails suivront.