Avis sur la Loi visant à reconnaître et à soutenir l’AC et l’ACA

Introduction

C’est en 2001 que le gouvernement adoptait, au terme de plus de six ans de travaux et de négociation avec le milieu, la Politique de reconnaissance et de soutien de l’action communautaire (PRSAC). Cette Politique était le fruit de plus de dix années de luttes et de revendication des organismes communautaires de tous les secteurs afin de répondre à un besoin criant d’investissements financiers, de stabilité et de reconnaissance du rôle qu’ils jouaient dans la société.

À cette époque, la question de la prescription s’est posée rapidement. Dans son rapport, Gérald Larose, qui avait été mandaté pour faire une grande tournée des organismes du Québec, avait recommandé d’opter pour une loi-cadre alors que les discussions du milieu étaient partagées. Devait-on adopter une loi ou une politique nationale? Au terme de nombreuses discussions et d’un commun accord, le gouvernement et le milieu ont convenu qu’il serait préférable d’opter pour une politique afin, notamment, de permettre une certaine flexibilité et adaptabilité à ce modèle unique au monde que nous étions en train de créer.

Vingt ans plus tard, force est de constater que cette Politique, bien qu’elle ait été très positive et stabilisatrice pour le milieu, n’a pas suffi à assurer le respect des engagements gouvernementaux ni à assurer un soutien adéquat qui réponde à l’évolution des besoins des organismes d’action communautaire autonome.

Dans son rapport publié en 2008, Deena White, qui était mandatée pour évaluer la mise en œuvre de la Politique, faisait déjà le même constat :

Mais cette Politique reste fragile. Elle n’a pas encore atteint tous ses objectifs de façon convaincante et perceptible. Elle a même été affaiblie en cours de route, en partie par la diversité des interprétations et la souplesse des pratiques, par des financements insuffisants, par le maintien de manières de faire traditionnelles, mais surtout par la diminution des attentes tant dans le milieu communautaire que gouvernemental.[1]

Aujourd’hui, au terme d’une longue consultation du milieu pour un nouveau plan d’action gouvernemental en action communautaire, le mouvement d’action communautaire autonome identifie comme un obstacle majeur le fait que cette Politique ne soit pas prescriptive alors qu’elle reflète exactement la volonté et les besoins des organismes. C’est pourquoi la nécessité de rendre prescriptive la Politique, par une loi-cadre ou autre, est ressortie comme un élément fort des mémoires déposés. La consolidation du financement à la mission pour les organismes d’ACA dans tous les ministères en est un bon exemple. Déjà, l’équipe de Deena White avait constaté de graves lacunes en ce domaine dès 2006 :

Moins de la moitié des ministères concernés par la politique offrent un programme de financement en appui à la mission globale dédié exclusivement à l’action communautaire autonome en respectant les marqueurs indiqués dans le Cadre de référence. Certains n’offrent pratiquement, aucun financement à la mission globale. D’autres encore ont monté des programmes de financement à la mission, mais les réservent à une classe d’organismes identifiée par des critères autres que ceux indiqués par la PRSAC (liant ainsi ce type de financement à des priorités ou orientations gouvernementales), ou bien ils ne versent que très peu d’argent dans ces programmes qui demeurent alors précaires.[2]

Sa recommandation à l’effet que « tous les ministères responsables de rendre accessible à tous les groupes œuvrant dans leur domaine qui font la démonstration de mettre en œuvre des pratiques qui correspondent aux divers indicateurs de l’ACA proposés dans le Cadre de référence, un programme de financement en appui à la mission globale[3] » n’a manifestement pas été mise en application. Quinze ans plus tard, le temps est venu de mettre en place un outil plus contraignant qui obligerait notamment les ministères à offrir un programme de financement à la mission pour les organismes d’ACA; qui confirmerait la distinction entre l’action communautaire et l’action communautaire autonome et; qui assurerait la pérennisation du soutien gouvernemental par l’adoption d’un plan d’action en action communautaire tous les cinq ans. Une loi-cadre pourrait-elle contribuer à atteindre nos objectifs? Cet avis constitue l’état actuel de nos réflexions à cet égard.

 

Lire l’avis du RQ-ACA sur la Loi visant à reconnaître et à soutenir l’action communautaire et l’action communautaire autonome. (Lire le document en version word ici)

 

[1] Deena White. La gouvernance intersectorielle à l’épreuve. Évaluation de la mise en œuvre et des premières retombées de la Politique de reconnaissance et de soutien de l’action communautaire. Université de Montréal, Centre de recherche sur les politiques et le développement social, mars 2008, p. 134.

[2] Ibid., p. 101.

[3] Ibid., p. 103.